Le "système usuel" et ses mesures (1812-1840)

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Kelerm
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Les mésaventures du système métrique (1800-1839)

Souhaitant donner une nouvelle impulsion à la diffusion du système métrique, le gouvernement prescrivit, par un arrêté du 13 brumaire an IX (4 novembre 1800) : le système décimal des poids et mesures sera définitivement mis à exécution pour toute la République, à compter du 1er vendémiaire an X (23 septembre 1801)... et l'arrêté ajoutait :

« Pour faciliter cette exécution, les dénominations données aux poids et mesures pourront dans les actes publics, comme dans les usages habituels, être traduites par les noms français qui suivent... :

...Le kilogramme pouvait ainsi s'appeler la Livre
Le centimètre pouvait ainsi s'appeler le doigt
Le litre pouvait ainsi s'appeler la pinte... »

Par ce retour au vocabulaire traditionnel, le gouvernement espérait familiariser plus facilement les usagers avec le nouveau système... mais le nom ancien, ainsi repris désignait maintenant une quantité différente de celle à laquelle il correspondait dans le passé.

Les tolérances d'appellations admises par l'arrêté du 13 brumaire an IX étaient ainsi des sources constantes de confusion et de fraudes. Cette situation devait durer jusqu'en 1812. Elle se dégrada encore par le décret impérial du 12 février 1812.

Le 12 février 1812, est autorisé l'abandon de la division décimale et le retour aux subdivisions anciennes, par un décret qui précise : « Il ne sera fait aucun changement aux unités des poids et mesures de la France, mais il sera confectionné pour l'usage du commerce, des instruments de pesage et de mesurage qui présentent soit les fractions, soit les multiples desdites unités les plus en usage dans le commerce et accommodés aux besoins du peuple ».

Les textes d'applications (arrêté et circulaire du 28 mars et suivants) insistent sur le fait que « ces dispositions n'étant relatives qu'à l'emploi des mesures et des poids dans le commerce de détail et dans les usages journaliers, les mesures légales continueront à être seules employées dans tous les travaux publics, le commerce en gros, et toutes les transactions commerciales. Le système légal sera aussi seul enseigné dans les écoles publiques ». Il s'agit de « mesures simplement tolérées », portant toujours l'indication de leur correspondance en valeurs métriques, et dont l'usage devra faire l'objet d'un nouvel examen dans un délai de dix années.

Ce système de « mesures usuelles » prétendait faire accepter le système métrique en le replaçant dans un cadre « familier au peuple », mais ce cadre n'était familier qu'aux habitants de la Région parisienne.

Toutefois, en juillet 1814, le Ministère de l'Intérieur suscita une décision rapide du roi Louis XVIII : « L'établissement du système métrique sera continué sur le plan qui a été suivi jusqu'à présent ».

Ainsi, à partir de 1812 et jusqu'en 1839, les marchands ont pu utiliser :

* Une toise de 2 mètres, se divisant en 6 pieds; le pied valant ainsi un tiers de mètre, se divisant en 12 pouces, le pouce en 12 lignes;
* Un boisseau de un huitième d'hectolitre, ayant son double, son demi et son quart;
* Une aune de 120 centimètres, se divisant en demis, tiers;
* De plus la « livre » équivalait à environ 489 grammes en 1789, puis à 1000 grammes en 1800 et 500 grammes en 1812.

Un arrêté du 21 février 1816 rend obligatoire et exclusif pour la vente au détail de toutes les denrées et marchandises l'emploi des mesures usuelles (aune, boisseau...). Cette fois Napoléon 1er a renoncé au système décimal, a abandonné la base 10 pour les sous-divisions : moitié, quart, huitième !

Il régna aussitôt en France, une confusion extrême dans le pesage et le mesurage.

Heureusement, l'élite de la nation réagit. Les écoles continuent à enseigner le système métrique et l'arrêté de 1816 est abrogé en 1825, un « Recueil d'instructions sur les poids et mesures » paraît en 1827, et le 24 avril 1833, dans une circulaire, Thiers, alors ministre du commerce et des travaux publics, constate que si le système a progressé, l'usage des mesures usuelles semble entraver son application. Il reconnaît que certains vérificateurs, mal formés font mal leur travail..., il demande aux préfets de prévoir des tournées de surveillance après celles de vérification.

L'exposé des motifs d'un projet de loi en 1837 comportait le passage suivant :

« Le moment semble venu où la révocation des concessions faites en 1812 peut avoir un salutaire effet. Le peuple est aujourd'hui plus instruit; le système métrique, qui a continué à être enseigné dans les écoles est généralement connu; l'instruction primaire qui prend un si vaste développement le fera connaître avec bien plus de soin, et aux plus pauvres, dès qu'il sera constant qu'il est remis en vigueur. Tout indique qu'en rendant le système métrique obligatoire partout, et pour tous, en interdisant l'usage de tout autre système, la loi nouvelle n'exigera rien d'impossible, et établira définitivement l'uniformité des poids et mesures ».


source : http://www.amisdelamesure.org/atous/partie1/art2.shtml (dernier tiers de la page)

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